dimanche 12 novembre 2017

Réparer les Vivants - Maylis de Kerangal

 

 Le cœur de Simon migrait dans un autre endroit du pays, ses reins, son foie et ses poumons gagnaient d’autres provinces, ils filaient vers d’autres corps. »
Réparer les vivants est le roman d’une transplantation cardiaque. Telle une chanson de gestes, il tisse les présences et les espaces, les voix et les actes qui vont se relayer en vingt-quatre heures exactement. Roman de tension et de patience, d’accélérations paniques et de pauses méditatives, il trace une aventure métaphysique, à la fois collective et intime, où le cœur, au-delà de sa fonction organique, demeure le siège des affects et le symbole de l’amour.










Réparer les Vivants (2014)
Auteur : Maylis de Kerangal
Éditeur : Verticales
Parution : 2014
Pages : 281
EAN-13 : 9782070144136


 Lecture ambivalente qu'a été ce livre. Sujet difficile, j'ai beaucoup apprécié, et en même temps certaines choses m'ont dérangées. Je ne sais comment vous parler de cette auteure et ses mots sans m'éparpiller, sans être trop brouillonne ... 

Un jeune homme meurt au début des pages, son corps est transporté à l'hôpital et l'on suit durant un court temps tous les gens autour : ses parents, sa copine, les médecins et infirmières qui vont avoir un rôle à jouer, même bref, avec Simon, avec son corps et avec le don d'organe. Car c'est de ça que parle le livre, et beaucoup plus. 
Ce livre parle aussi de la mort, du deuil, de la maladie, de l'attente, et bien sûr de la vie. 

L'écriture de l'auteure est particulière, plus qu'un récit j'avais l'impression d'être plongée dans les pensées des personnages, ce qui était très perturbant au départ mais aussi très intéressant. du coup, tout semblait plus réaliste mais aussi plus "raw", plus brut. Il n'y a pas de dialogues comme on les entend.

 « Combien de temps leur faudra-t-il pour venir se placer sous le régime de la mort ? Pour l'heure, ce qu'ils ressentent ne parvient pas à trouver de traduction possible mais les foudroie dans un langage qui précède le langage, un langage impartageable, d'avant les mots et d'avant la grammaire, qui est peut-être l'autre nom de la douleur, ils ne peuvent s'y soustraire, ils ne peuvent lui substituer aucune description, ils ne peuvent en reconstruire aucune image, ils sont à la fois coupés d'eux-mêmes et coupés du monde qui les entoure.»

Les états émotionnels résonnaient en moi durant ma lecture : colère, culpabilité, désespoir. La mort est abordée d'une façon qui m'a beaucoup plu : Le temps s'arrête et il repart mais les proches sont en décalés du reste du monde. Plus tout à fait avec les secondes et les minutes qui s'écoulent mais comme s'ils avaient un temps de retard et qu'on les voyait courir après la vie qui ne les attend pas. Vous voyez ce que je veux vous dire ? La mort est omniprésente, mais c'est aussi la vie qu'on ressent tout au long de l'histoire. L'action se déroule en 24h et j'ai eu l'impression qu'un mois s'était écoulé !
On passe d'un personnage à l'autre, certains qu'on ne voit qu'une fois, d'autres un peu plus, et les médecins et infirmiers ne sont pas montrés que comme des machines, comme des professionnels mais aussi comme ceux qu'ils sont avant tout : des humains.
 Enfin, le livre ne parle pas seulement de la mort, mais aussi de la vie et de l'espoir, et j'ai beaucoup aimé la dernière partie, et le petit clin d'oeil ingénieux (vous comprenez si vous avez lu ce roman !) 

 « sa phrase est lente, ponctuée de reprise de souffle, manière d'y inscrire son corps, de le rendre présent dans sa parole, de faire de la sentence clinique une empathie, il parle comme s'il ciselait une matière, et maintenant ils se tiennent les yeux dans les yeux, se font face, c'est cela, rien d'autre que cela, un absolu face-à-face, et celui-là s'accomplit sans faillir, comme si parler et se regarder étaient le recto et le verso d'un même geste comme s'il s'agissait de se faire face autant que de faire face à ce qui profile dans une des chambres de l'hôpital »

MAIS, je trouve qu'il y a parfois des problèmes de rythmes, trop de comparaisons et de métaphores qui sont certes très jolies mais qui gâchent le rythme de l'action, quand des personnages s'embrassent faut-il passer une demi-page à décrire ce que ça fait en métaphores toutes plus ... Je ne veux pas dire prétentieuses car ce seraient trop péjoratif, mais parfois un peu éloignée de la réalité !  
Mais aussi des longueurs, car certains passages me semblaient de trop (un petit chapitre sur un oiseau ...) et j'avais envie de les sauter pour revenir à ce qui m'intéressait, l'émotion, la vie. Cela m'a un peu frustré ! 

Ce que je trouve dommage également revient au style : Les pensées, car les personnages changent mais les pensées restent les mêmes : aucun changement de style. Je pense que c'est parce qu'en réalité le narrateur ou la narratrice s'imagine les pensées que pourrait avoir chaque acteur de ce livre, mais j'ai trouvé cela un peu embêtant pour me plonger totalement dans la lecture et voir réellement chaque personnes comme différentes les unes des autres.
Les personnages ressemblaient plus à des ombres dans ma tête et ne se sont pas assez matérialisés sous mon regard. 

Je ne peux en dire plus, et j'ai bien conscience de ne pas être très claire, mais je ne veux pas que vous pensiez que je dis du mal du style de Maylis de Kerangal, c'est juste qu'à titre personnel, certains points m'ont coupés dans la lecture !   

Je vous conseille cette oeuvre car il apprend beaucoup sur le don d'organe. Parce qu'il est court et qu'il se lit relativement bien, parce que les états des personnages sont intenses et réels, que le corps médical est humanisé. 
Mais si vous avez du mal avec les écritures ... originales, que vous préférez les livres où l'action vous pète à la figure à l'introspection omniprésente, alors détournez-vous, ce livre n'est pas pour vous.

Pur ma part, je ne regrette pas l'avoir lu, et de belles phrases me restent en tête, mais je n'ai pas été transcendée par ce roman.. 

Et vous ? Vos lectures du moment ? 
Des livres à me partager sur la maladie, la mort, etc ? 
 

8 commentaires:

  1. Coucou Lizelandre !
    Ton avis me donne envie de découvrir ce livre, mais je ne pense pas le lire tout de suite... La mort et le fait que nous soyons humains sont des sujets beaux et importants, je trouve. Et c'est ce que l'on ressent lorsqu'on lit ta chronique :)

    Pour ma part, j'aimerais bien lire "Si je reste" de Gayle Forman. Alors oui, il y a un coté romantique, mais je pense aussi très humain (l'amour est un sentiment, après tout) et un peu philosophique sur le rapport que nous avons avec la vie et la mort.

    Je te fais des bisous, à très vite ! ♥

    Sue-Ricette

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    1. Coucou,

      je suis contente que ça te donne envie de le lire, et que tu ressentes ça depuis ma chronique parce que c'est vraiment ce que j'ai essayé de montrer !

      Oui c'est aussi un livre qui me tente bien, c'est aussi pour ça que je n'ai toujours pas regardé le film (parce que j'ai envie de découvrir cette histoire en la lisant) et le fait qu'il y ait une romance n'est pas du tout un problème à mon sens,

      Je te fais des bisous ♥

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  2. J'ai peur qu'il soit trop dur et trop triste pour moi...

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    1. Je comprends, pour ma part (et alors que je suis une très grande pleureuse) le style littéraire m'a permis de rester en retrait (peut-être un peu trop) mais c'est un sujet difficile en effet !

      Merci pour ton commentaire :)

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  3. J'ai beaucoup aimé ce roman. Justement, moi j'ai aimé le style, ces phrases interminables ponctuées des virgules nombreuses, comme autant de battements de coeur, ce coeur qui ne doit pas s'arrêter. Très beau souvenir de lecture pour moi :)

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    1. J'aime beaucoup ta façon de lier le style aux battements d'un coeur, c'est aussi ce que j'ai ressenti et ça en fait un point positif dès qu'il s'agit de décrire des émotions, des ressentis, les spirales de pensées, mais ça me touchait beaucoup moins dès que l'action entrait en jeu !
      D'où l'ambivalence ! Mais je comprends tout à fait que ça te plaise (elle a un réel talent cette auteure !)

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  4. Bonjour, bonjour,
    Je viens JUSTE de publier ma chronique et me voilà, après quelques recherches, sur ton blog. Ce que tu écris est très intéressant et je te rejoins sur le style parfois très... poussif de l'auteure. Pour ma part, j'avais la sensation d'étouffer, sans points ni paragraphe et avec autant, autant de mots pour décrire un baiser, une embrassade ou un regard... Bref, super dense et pas toujours très "utile".
    Mais en même temps... l'auteure écrit juste magnifiquement bien. Je suis très partagée (et j'ai eu du mal à écrire mon billet ^^).
    Au plaisir de te lire à nouveau!

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    1. Coucou !

      J'aime beaucoup le mot que tu emploies "poussif" c'est en effet ce que j'ai ressenti (malgré toute la beauté de son écriture qu'on ne peut lui retirer !), que ça bloquait dans l'action et que ça me faisait déborder parfois ! Et en effet, on peut se questionner sur l'utilité.

      Au plaisir d'échanger avec toi (difficile d'écrire sur son texte) je vais passer voir ton blog :)

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